L’effet de la numérisation sur les facteurs de risque psychosociaux et les TMS

Update 05/10/2023

La numérisation de l’économie a déjà considérablement modifié la nature et l’organisation du travail en Europe. Au cours des dix années à venir, plus de la moitié de la population active européenne sera confrontée à des changements majeurs dans sa manière de travailler. Comment dès lors adapter la politique en matière de sécurité et de santé au travail (SST) et, en particulier, la politique de prévention des troubles musculosquelettiques (TMS)?

Les défis émergents en matière de SST dans un monde du travail en mutation 

La numérisation de l'économie a entraîné l’accroissement de la robotisation et l’apparition de nouvelles formes de travail (comme le travail à distance ou le travail sur plateforme numérique). Ces changements engendrent des défis nouveaux et émergents en matière de santé et de sécurité au travail (SST). Ce qui modifie également la manière dont les travailleurs sont exposés à différents facteurs de risque biomécaniques, organisationnels et psychosociaux en matière de TMS. 

Bien que l'automatisation accrue puisse réduire la charge de travail physique et psychosociale, il existe également des indications montrant que c'est le contraire qui se produit. Dans certaines situations de travail, l'automatisation entraîne une augmentation de la répétition des tâches, du rythme de travail, de la fatigue physique, de la charge de travail cognitive et de la pression psychosociale. Les principaux facteurs sont le contrôle et la surveillance électroniques constants des prestations des travailleurs et la fixation de tâches et d'objectifs de temps par des algorithmes. Cela peut amener les travailleurs à travailler trop vite ou trop longtemps, ou à compromettre leur sécurité, par exemple en ne respectant pas les procédures de levage sûres.  

Le pourcentage de travailleurs souffrant de surcharge cognitive, de fatigue cognitive et physique et de diverses formes de "stress technologique" augmentera si aucune attention n'est accordée à la planification d'un travail du travail de contenu, centré sur l'humain, à mesure que la numérisation s'intensifie.

L’enquête "Eurobaromètre Flash - Le pouls de la SST" de l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail (EU-OSHA) de 2022 a révélé que les technologies numériques régissent le rythme du travail de plus de la moitié des répondants. 37% d’entre eux ont souligné que ces technologies augmentent leur charge de travail, un tiers, qu'elles renforcent le contrôle et un cinquième, qu'elles réduisent leur autonomie de travail. Compte tenu du lien établi entre les TMS et les risques psychosociaux, il faudra tenir compte de cette réalité dans la politique de prévention des TMS.

Le rapport de l’enquête est disponible en anglais sur le site de l'EU-OSHA: Le pouls de la SST: la sécurité et la santé professionnelles sur les lieux de travail après la pandémie.

Nouvelles opportunités pour la prévention des TMS

La numérisation offre pourtant aussi des opportunités d'améliorer la prévention des troubles musculosquelettiques, en fonction de la manière dont la technologie est appliquée, gérée et régulée.

Des outils ou procédures appropriés devront être mis au point pour surveiller tous les risques spécifiques liés à la numérisation (y compris le travail virtuel, le télétravail et les schémas de travail flexibles). La clé du succès réside dans une conception centrée sur l'humain dès le départ et qui renforce les capacités humaines. C’est l’être humain qui est et reste le patron, pas la technologie. Les technologies peuvent également soutenir la prévention des risques, par exemple une appli d’évaluation des risques qui permet aux télétravailleurs de contrôler leur lieu de travail à distance. 

Une autre possibilité offerte par la numérisation consiste à réduire les tâches physiquement exigeantes, répétitives ou routinières grâce à l'utilisation d'exosquelettes, de robots et de cobots (un "robot collaboratif"). 

Dans le cas des robots, il est important qu'ils collaborent avec les humains et que les travailleurs ne soient pas cantonnés aux tâches du quotidien, souvent très répétitives. Il existe également un potentiel pour une autonomie et une flexibilité accrues, la réduction des temps de déplacement grâce au télétravail, et un meilleur accès au marché du travail pour les travailleurs âgés, handicapés ou nécessitant des soins à domicile.

Toutefois, tout cela n'est possible que si la SST est considérée comme faisant partie intégrante du processus de mise en œuvre des évolutions numériques au travail. Dans un exemple de bonne pratique aux Pays-Bas, les technologies introduites pour réduire la charge de travail physique des travailleurs ont permis accélérer le processus de travail. Mais l'employeur a décidé d'y renoncer pour éviter le stress chez les travailleurs. Pour en savoir plus sur cette étude de cas en anglais, consultez le site de l’EU-OSHA: Pays-Bas: automatisation de l’empilage des caisses et des boîtes afin de réduire le levage manuel au sein d’une entreprise de culture de légumes.

Collaborer avec les nouveaux travailleurs numériques

Ces évolutions sur le lieu de travail, comme le fait de ne pas se trouver au même endroit physique, signifient qu'une communication efficace est plus importante que jamais. Il est essentiel de mettre en place des interventions participatives, en veillant à ce que les travailleurs comprennent comment les technologies numériques sont utilisées et comment elles peuvent entraîner des exigences élevées. Si ces politiques s'inscrivent dans une culture d'entreprise forte, axée sur la prévention, elles contribueront à leur succès.

La prévention et la gestion des risques psychosociaux et des troubles musculosquelettiques doivent être adaptées en permanence au développement des technologies numériques et aux changements organisationnels. Il convient de promouvoir des projets d'intervention novateurs et de les adapter aux différents groupes de travailleurs qui évoluent dans des environnements en constante mutation.

Plus d’infos

(Source: EU-OSHA News – novembre 2022: The digitalisation of work: its impact on psychosocial risk factors and work-related musculoskeletal disorders)