10.02.2022

update 05/10/2023

Les travailleurs de certains groupes de population, comme les femmes, migrants, lesbiennes, homosexuels, bisexuels, transgenres ou intersexués (LGBTI) travaillent souvent dans des secteurs présentant davantage de risques de développer des troubles musculosquelettiques (TMS). Il découle de cette ségrégation sectorielle que ces groupes de travailleurs courent davantage de risques que les autres.

Qu’est-ce que la ségrégation sectorielle et pourquoi survient-elle ?

La ségrégation sectorielle désigne un type de ségrégation horizontale dans lequel des groupes de population spécifiques sont plus susceptibles d'être occupés dans un secteur particulier. Ainsi, certains secteurs occupent par exemple un plus grand nombre de travailleuses.

Dans l’enseignement, 72% des travailleurs sont des femmes. Dans les soins de santé et le travail social, elles représentent 78% des travailleurs, dans les services à la personne 89%, dans le secteur du nettoyage 84% et 72% dans les services à la clientèle. Dans ces secteurs, les travailleurs sont plus fréquemment amenés à être en contact avec des clients, des étudiants ou des patients lors de l’exercice de leur travail. Ce type de travail présente une exposition accrue à des facteurs de risques débouchant sur des affections liées au stress ou des TMS. En outre, les travailleurs s’exposent à des risques physiques comme soulever et déplacer des patients ou rester debout ou assis pendant de longues périodes. Ces conditions de travail présentent un lien direct avec les TMS.

L’une des raisons à l’origine de cette ségrégation sectorielle est la différence entre le travail à temps plein et à mi-temps. Ce dernier est plus répandu dans certains secteurs, comme ceux que nous avons mentionnés plus haut. Une femme peut par exemple choisir de travailler à temps partiel afin de combiner son travail avec d’autres tâches, comme celle de s’occuper d’un enfant ou d’un parent. Ces responsabilités sont le plus souvent assumées par les femmes, avec une notable disproportion.

On retrouve un autre exemple de ségrégation sectorielle chez les travailleurs migrants. Ce groupe de travailleurs est principalement actif dans l’HoReCa, l’agriculture, les secteurs de la construction et des soins de santé et dans le domaine du travail social. Ce groupe est plus susceptible de devoir effectuer des travaux lourds ou physiquement exigeants que les travailleurs autochtones (16% contre 12%). Les travailleurs migrants sont plus exposés que les travailleurs autochtones aux vibrations, aux positions douloureuses, au port de charges lourdes et à la station debout ou à la marche pendant de longues périodes. Tous ces éléments contribuent aux facteurs de risques de développer un TMS.

Parmi les facteurs susceptibles d'entraîner une ségrégation sectorielle parmi les travailleurs migrants, citons le fait qu'il est moins probable qu’ils disposent d’une qualification professionnelle. De ce fait, ces travailleurs sont plus susceptibles de se retrouver dans des secteurs et des emplois qui requièrent principalement un travail manuel, moins attractifs pour les travailleurs du pays d'accueil. En outre, les travailleurs migrants ont souvent une moins bonne connaissance de la langue du pays d'accueil, ce qui limite leur capacité à postuler des emplois.

Les travailleurs LGBTI, davantage exposés que les autres à la discrimination, l’intimidation, le harcèlement et la violence verbale, sont plus susceptibles de travailler dans des secteurs où ces risques sont moins présents. À cet égard, pensons à l’enseignement, aux secteurs des soins de santé et artistique; des secteurs qui se trouvent être dominés par les femmes.

Quels sont les risques de ségrégation professionnelle par niveau d'emploi ?

Outre la ségrégation horizontale décrite ci-dessus, il existe une ségrégation verticale, dont il convient de tenir compte. La ségrégation verticale fait référence à un groupe spécifique de travailleurs ayant moins d’opportunités que les autres d'obtenir une fonction supérieure au sein d'une organisation et donc de se construire une carrière. Ce type de ségrégation peut entraîner un manque de motivation chez les travailleurs et avoir un effet sur leur bien-être mental ce qui peut, à son tour, augmenter le risque de TMS.

Diverses études montrent que les femmes ont moins de chances que les hommes d'obtenir des postes de direction bien rémunérés, ce qui se traduit par des salaires inférieurs. Cela signifie que ces travailleurs sont plus exposés au risque de développement ou d'aggravation de TMS, car ils sont plus susceptibles d'occuper le même poste pendant une plus longue période. En outre, les hommes et les femmes ayant le même titre professionnel n'effectuent souvent pas les mêmes tâches, ce qui les expose à des risques physiques et psychiques différents.

Les travailleurs LGBTI, comme les travailleuses, sont confrontés au phénomène du "plafond de verre". Ce groupe rencontre en effet des difficultés pour accéder aux postes supérieurs. Les travailleurs LGBTI ont même 11% de chances en moins d'occuper un poste de direction.

Les migrants hautement qualifiés occupent souvent des emplois peu qualifiés. Cela confirme l'idée que les migrants ont moins de chances de trouver un bon emploi dans le pays d'accueil, même en possédant les bonnes qualifications. Cette présence plus importante dans les professions peu qualifiées engendre une plus grande insécurité d'emploi, un risque plus élevé d'accidents et des salaires plus bas.

Comment les entreprises peuvent-elles protéger les travailleurs ségrégés ?

Il est essentiel d'élaborer et de mettre en œuvre une vaste stratégie de prévention des TMS. Les travailleurs sont mieux protégés lorsque l’on agit de manière participative et en collaborant avec les travailleurs les plus touchés. En outre, une analyse des risques tenant compte de la diversité et adaptée aux travailleurs féminins, aux (travailleurs) migrants et aux travailleurs LGBTI donne une meilleure idée du niveau de risque.

Les initiatives de politique publique peuvent également contribuer à réduire les risques de TMS pour les travailleurs ségrégés. Osalan, l’Institut basque pour la sécurité et la santé au travail (SST), en fournit un bon exemple avec sa boîte à outils “Guidelines for the integration of the gender perspective in the prevention of occupational risks”.

Les auteurs de cette publication suggèrent que les outils de prévention des risques existants en Espagne ont été développés du point de vue d'un "prototype masculin". Cette boîte à outils tente de proposer une approche plus inclusive de la prévention des risques liés à la SST en intégrant la perspective de genre dans la discussion.

De telles boîtes à outils peuvent aider les managers à reconnaître un plus large éventail de problèmes de SST, y compris ceux qui touchent des groupes particuliers.

Plus d'informations

Divers articles sur BeSWIC

Différents articles sur le thème de la diversité ont été récemment publiés sur ce site BeSWIC. Vous en trouverez ci-après quelques exemples:

Des informations complémentaires sont également disponibles dans la rubrique Genre, ainsi que dans les thèmes Ergonomie et Troubles musculosquelettiques (TMS).

(Source: Healthy Workplaces Campaign News - février 2022: Understanding workplace segregation and how it can affect musculoskeletal health)