28.10.2016

Depuis une dizaine d'années, la Belgique connaît une augmentation drastique du nombre de malades de longue durée. Ceci entraîne des prévisions pour 2016 qui laissent à penser que le coût de l'incapacité au travail pour la sécurité sociale sera supérieur au coût du chômage. Il faut remettre les malades de longue durée sur le marché du travail. 

La question n'est pas de réduire le nombre de personnes en incapacité de travail mais, lorsque c'est possible et sur une base volontaire, il convient d'inciter le retour des malades sur le marché du travail en facilitant le travail et en augmentant les allers-retours entre périodes de soins et de travail. De la sorte, il sera possible de sortir d'un système binaire qui se limite à considérer que soit on est capable soit on est totalement incapable de travailler.

C'est dans cet esprit que Maggie De Block, ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, défend un projet de loi visant à assurer le renforcement du trajet de réintégration du travailleur malade grâce à une meilleure connaissance des facteurs qui influencent les chances de réintégration.

Cette volonté part d'un double constat. D'une part, plus vous restez longtemps malade, moins vous avez de chances de revenir sur le marché du travail. D'autre part, il y a lieu de constater que peu de personnes au sein du département des ressources humaines prennent la peine de s'enquérir de l'état de santé des travailleurs malades et de leur état de guérison.

Le projet de loi a donc le mérite de pallier ces lacunes en imposant une collaboration active entre le travailleur et l'employeur pour faire en sorte qu'un retour du travailleur soit possible dans de bonnes conditions et le plus rapidement possible.

Sans entrer dans les détails du projet de loi, la ministre souhaiterait qu'après un mois et après six mois de maladie, une rencontre ait lieu entre le travailleur et la mutualité du travailleur afin de répondre à un questionnaire qui viserait à examiner quels facteurs entravent la réintégration et quels facteurs la favorisent.

Sur la base de ce questionnaire, le médecin-conseil pourra alors évaluer facilement, en tout cas plus rapidement, l'opportunité d'un trajet de réintégration au sein de l'entreprise.

Ce trajet pourra prendre la forme d'une adaptation du régime de travail mais portera également sur les modalités pratiques des prestations du travail.

Responsabiliser les employeurs

Comme l'esprit vise aussi à responsabiliser les employeurs, il est demandé à l'employeur de veiller à ce qu'il y ait le moins de malades de longue durée possible au sein de leur entreprise.

Cette approche ne fait que renforcer l'esprit de la loi du 28 février 2014 en matière de prévention des risques psychosociaux au travail, par le biais de laquelle l'employeur se voyait imposer de mettre en place une véritable politique de lutte contre les risques psychosociaux au travail. Cela ne semble pas suffisant. Pour cette raison, la ministre souhaite que les entreprises investissent dans la réintégration des travailleurs en incapacité de travail.

Enfin, Maggie De Block prévoit que pendant un certain laps de temps, après que le travailleur a reçu son salaire garanti, la mutualité ne paiera plus qu'une partie de l'allocation. La partie restante sera payée par l'employeur. Les petites entreprises seront épargnées autant que possible.

Aujourd'hui, en cas d'incapacité de travail, l'employeur ne sera pas tenu de payer le salaire pendant uniquement un mois, comme c'est le cas en Belgique. L'employeur sera tenu de payer le salaire du travailleur pendant deux ans. En d'autres termes, pendant deux ans, le travailleur malade constituera une charge financière pour l'employeur.

Face à une telle situation, on comprend aisément que l'employeur fera tout pour éviter que le travailleur ne tombe dans une maladie qui sera de longue durée. Prévention, protection, bien-être, accompagnement, formation, toutes ces notions prennent leur sens lorsque l'employeur est conscient qu'une incapacité de longue durée a des conséquences financières importantes pour son entreprise.

(Source: Thierry Duquesne (avocat - NautaDutilh), L'Echo, 13 octobre 2016)